Avec l’expo « Douce France » chez Spacejunk, C215 nous propose une balade dans l’imaginaire collectif et populaire des Français. Des portraits de célébrités surgissent de supports étonnants et disparates avec humour ou mélancolie.
Le pochoir, technique toujours préférée de C215, s’invite de partout, se fait multiformes dans un jeu avec le visiteur. Ici, pas de tabou, l’identité collective et populaire française est une question ouverte sans exclusion qui cherche à montrer la richesse de la diversité.
Après Fécamp, Paris, Bayonne, c’est au tour de Lyon puis Grenoble (à Spacejunk) et Montpellier de découvrir de nouveaux visages de C215, surprenants, parfois provocateurs ou amusants : une image du Street Art libre à la française !
Extraits de l’interview avec C215 :
– S.A.L : Comment est née l’exposition : « Douce France » ?
– C215 : J’ai eu une première proposition institutionnelle d’exposition individuelle au Palais de la Bénédictine à Fécamp. Je venais d’être révolté par le fait que l’on puisse jeter des bananes sur notre ministre de la justice, Christiane Taubira, pour l’insulter. De là, je me suis dit que ce serait assez intéressant, puisque le concept d’identité nationale était, comme tant d’autres sujets, confisqué par l’extrême droite, de travailler sur une approche alternative de cette question.
L’identité collective française, depuis un siècle, s’est trouvée diversifiée, enrichie, par différentes vagues d’immigration, un rôle plus important de la femme au XXème siècle notamment. Ce qui était aussi intéressant c’était de voir comment le peuple français ne se distinguait peut-être pas seulement par l’excellence mais aussi par des ratés à la française comme les tabous que sont le nucléaire, la colonisation, la militarisation…J’ai voulu faire une exposition un peu risquée, un reflet de ma perception subjective de l’identité collective et populaire française.
-Finalement l’élaboration de l’exposition a pris une dimension plus collective ?
-Oui, j’ai sollicité une dizaine d’amis et de journalistes pour avoir d’autres perceptions, on a élaboré aussi un livre ensemble…Ensuite, un peu comme à mon habitude, mais de manière plus accentuée cette fois, j’ai tenté d’interagir, pour chaque œuvre, avec un support pour décaler ou approfondir le sens de chacun des portraits, l’orienter parfois même de manière mélancolique ou douce et au final le moins sérieusement possible. J’ai souhaité, malgré un sujet grave, une exposition divertissante !
-As-tu peint des anonymes ?
-Pas cette fois, j’ai choisi uniquement des personnalités célèbres pour représenter l’imaginaire collectif. Et puis je suis portraitiste avant tout, je ne fais pas d’exception dans mes sujets. Je peins n’importe où et n’importe qui, quand bon me semble ! La carrière d’un artiste n’a d’intérêt que si elle est imprévisible, pleine de surprises, narrative, créant ainsi des réactions, des émotions…Il faut savoir satisfaire mais aussi décevoir !
-Le Street Art en galerie : un paradoxe ?
-Un artiste doit pouvoir intervenir, exposer où il veut et cela ne conditionne pas son talent. Je suis libre. J’ai déjà peint dans un commissariat, au commissariat de l’énergie atomique, dans des endroits incroyables ! Je pratique un art contextuel donc j’interagis avec le lieu ou l’objet présent. Et puis, avec le temps, j’ai appris à nuancer les choses, à les complexifier…
-As-tu quelque chose à ajouter sur l’exposition ?
-C’est une tournée française, ce qui en renforce le contexte. Avec « Douce France », j’ai voulu faire une exposition ludique et je l’espère, par certains de ses supports ou des sujets traités, surprenante, un peu à rebours des sujets ultra-colorés, chatoyants du Street Art habituel que l’on attendait de moi. C’est important de créer la surprise et de rester libre !
Propos recueillis par N. Beaucamps
Exposition « Douce France » de C215 chez Spacejunk Lyon jusqu’au 25 juillet 2015.